Chaque année en France, 10 000 personnes sont atteintes par ce mal qui altère les mouvements et affecte les facultés intellectuelles.
Le pape Jean Paul II, l'ancien boxeur Muhammad Ali (ex-Cassius Clay), ou encore le comédien américain Michael J. Fox sont quelques-unes des personnalités qui donnent un visage au mal qui les a atteintes : la maladie de Parkinson. Cette affection se résume souvent dans l'esprit du public à des tremblements alors que ceux-ci ne constituent que l'un des aspects d'une pathologie qui mêle des troubles du mouvement et de l'équilibre et donne lieu à une atteinte cognitive sévère.
L'origine de cette maladie dégénérative de certains neurones du cerveau n'est pas encore élucidée, mais certains cas semblent clairement sous l'influence de facteurs génétiques. Quant aux différents traitements existants, ils ont en commun d'avoir une efficacité qui se perd au fil du temps, même si la voie neurochirurgicale connaît de beaux succès.
La complexité de l'apparence que peut prendre la maladie de Parkinson explique en partie le fait que, selon les estimations émanant de la direction générale de la santé, 10 % à 20 % des cas ne sont pas diagnostiqués. Néanmoins, les autorités sanitaires évaluent à 100 000 le nombre de personnes touchées en France où on dénombre, disent-elles, 10 000 nouveaux cas par an.
Plus de deux tiers (70 %) des malades ont entre 60 et 80 ans, et en règle générale cette affection n'entraîne que rarement un décès prématuré : moins de 2 % des 3 500 décès annuels attribuables à la maladie surviennent avant 65 ans. Cependant, le retentissement de la maladie de Parkinson sur la qualité de vie des personnes qui en sont atteintes et celle de leur entourage est majeur : 50 % des malades ont du mal à se déplacer et 10 % à 20 % ne peuvent quitter leur domicile ; dans 20 % des cas, les malades sont aussi victimes de troubles cognitifs sévères. Diverses études incitent également à penser que des syndromes démentiels sont présents dans au moins 20 % des cas.
La maladie, identifiée en 1817 par le médecin britannique James Parkinson, ne s'installe pas brutalement. Au début elle peut ne se manifester que par des signes non spécifiques : fatigue inhabituelle avant tout, mais aussi douleurs diffuses, tremblement de la main, raideur par intermittence. Viennent ultérieurement les signes constituant le "trépied" de la maladie de Parkinson : le tremblement de repos, la lenteur et la rareté des mouvements et, enfin, la rigidité.
Contrairement aux tremblements qui apparaissent lors d'un geste, celui du Parkinson a pour caractéristique d'exister au repos et de disparaître lors du mouvement. Il s'agit d'un tremblement régulier, classiquement comparé lorsqu'il atteint les mains au geste que l'on fait pour émietter du pain. Le tremblement peut également concerner le visage.
Deuxième signe : les mouvements ralentis et raréfiés. Sa manifestation la plus caractéristique porte sur la marche. La personne a du mal à se mettre en mouvement, elle piétine et, lorsqu'elle avance, c'est à petits pas, sans balancement des bras. Le visage devient inexpressif, figé. La parole est pauvre, avec des difficultés à articuler, la voix est monotone.
Troisième signe : la rigidité. Elle frappe les membres et la colonne vertébrale. Lorsque l'on mobilise le bras du malade pour un mouvement de flexion-extension apparaissent des à-coups, comparés à ceux d'une roue dentée.
De ces trois paramètres, le tremblement est celui qui a la plus grande valeur prédictive, surtout lorsque les symptômes initiaux ne sont pas symétriques. Plus tard, après trois à cinq ans d'évolution du mal, l'absence d'autre cause identifiée et une réponse marquée à la prise d'un médicament - la L-Dopa - améliorant les symptômes confirment le diagnostic qui est donc avant tout clinique.
Complexe, la maladie de Parkinson l'est aussi parce qu'elle ne relève pas d'une cause unique : des raisons différentes peuvent expliquer le même tableau. Une certitude, toutefois, l'anomalie porte sur des neurones situés dans le tronc cérébral - plus précisément dans le locus niger -, qui produisent un neurotransmetteur, la dopamine. Leur destruction entraîne un déficit cérébral en dopamine qui a pour effet de freiner le contrôle du mouvement par le thalamus.
Dans la maladie de Parkinson, l'atteinte n'est pas limitée aux neurones dopaminergiques. Plusieurs formations également situées dans le tronc cérébral - locus cœruleus, noyau dorsal du nerf vague, etc. -, voient leurs neurones détruits. Ce phénomène de raréfaction explique les signes persistants de la maladie - troubles de l'équilibre, les atteintes cognitives, les troubles de la déglutition, vésico-sphinctériens... - malgré un traitement substitutif en dopamine.
Le voile n'est pas encore complètement levé sur la cause de cette atteinte. Néanmoins, le groupe d'experts qui a travaillé pour la direction générale de la santé, en 2003, afin de préparer le projet de loi sur la santé publique a retenu deux déterminants de la fréquence de la maladie pour lesquels la littérature scientifique était "relativement consensuelle" : "L'exposition aux pesticides et autres produits phytosanitaires est un facteur de risque de maladie de Parkinson. La maladie de Parkinson est moins fréquente chez les fumeurs et ex-fumeurs que chez les non-fumeurs."
Les experts se sont toutefois gardés de toute conclusion hâtive. "Pour les pesticides, ont-ils écrit, les données sont insuffisantes pour estimer la relation dose-risque et le risque attribuable est vraisemblablement faible. Quant au tabac, la nature de l'association fait l'objet de nombreuses discussions."
Il faudra donc attendre encore pour identifier avec certitude des facteurs déterminants sur lesquels il serait possible d'agir afin de réduire le risque de développer une maladie de Parkinson.
Paul Benkimoun
Des facteurs génétiques dans certains cas
Les connaissances sur les facteurs génétiques de la maladie se précisent. "Une fois sur dix on trouve une maladie de Parkinson chez un parent d'un malade parkinsonien, indique le professeur Philippe Damier (chef du service de neurologie au CHU de Nantes). Des mutations d'un seul gène ont pu être identifiées. Dans quelques cas, il s'agit du gène d'une protéine appelée alphasynucléine. Plus fréquemment, dans le cas de formes à transmission génétique récessive, le gène muté est celui d'une autre protéine, la parkine. Cette dernière est une enzyme importante dans le système ubiquitine-protéasome." Ce système, dont la découverte a valu à ses auteurs le prix Nobel de chimie en 2004, est une sorte de broyeur de molécules qui sert à la dégradation des protéines. "Dans la maladie de Parkinson, décrit Philippe Damier, des anomalies entraînent l'accumulation de fragments protéiques anormaux, dont l'alpha-synucléine, et un mauvais fonctionnement du système ubiquitine-protéasome. Il n'est pas exclu que d'autres facteurs, comme le stress oxydatif, jouent aussi un rôle."