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La chronique de Laurent Greilsamer
Flaubert et Proust aussi faisaient des fautes !
LE MONDE | 07.02.05 | 14h51
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Ce sera une chronique de mauvaise foi. Une mauvaise foi totalement assumée après l'annonce par un groupe d'enseignants que les élèves sont nuls, définitivement nuls en orthographe. A en croire ce collectif qui sonne le tocsin, la situation est désespérée. Le résultat d'une dictée, testée auprès de 2 300 élèves, l'a confirmé dans son inquiétude. Toute une génération de collégiens et de lycéens serait constituée d'analphabètes, d'invalides linguistiques, d'incapables qui infligent à leur langue des traitements indignes.

Diable ! Est-ce si grave ? Est-ce bien nouveau ? Pour réaliser cet exercice un brin pervers, ces professeurs de lettres ont choisi Daudet, pas Léon, le pamphlétaire brillant et dingo de l'Action française, mais Alphonse, le bien-aimé Alphonse des Contes du lundi. La dictée commence comme une promenade bucolique : "On ne peut vraiment rien trouver de plus délicieux, de plus retiré que ce petit village perdu au milieu des roches, intéressant par son double côté marin et pastoral." Et cela continue ainsi, délicieusement rétro... Une dictée de l'ancien temps. Une dictée qui parle de "sol rocailleux", d'"écueils" et d'"écume". Un vrai piège à potaches.

Mais que cherchent-ils donc ces professeurs qui parlent toujours du temps jadis, de ce temps où la France rurale vivait au rythme des matines et des vêpres ? Ils cherchent un résultat, et ils l'ont trouvé : le niveau baisse ! Il baisse terriblement. Les petits Français ne connaissent plus ni langue ni ponctuation. Le collectif Sauver les lettres - qui s'autorise une pointe de modernité dans son adresse Internet : www.sauv.net - révèle que 56 % des cobayes ont récolté zéro et que seulement 12 % ont obtenu plus de la moyenne.

"Nous n'avons pas de garanties statistiques, mais nous considérons notre échantillon comme représentatif, a déclaré un membre du collectif. Le constat est accablant, le niveau baisse réellement." La preuve ? La même dictée, infligée à 1 700 élèves en l'an 2000, n'avait fait trébucher jusqu'au zéro pointé fatal que 28 % des élèves.

On a envie de poser quelques questions. Une question pour rire : nos dicteurs ont-ils su faire preuve de grandeur et dicter comme Topaze, ce personnage de Marcel Pagnol qui prononçait fortement les finales des mots pour aider ses élèves ? La question qui fâche : si tous les professeurs étaient aussi vigilants que ces défenseurs de l'orthographe, en serait-on là ?

GÉNÉRATION NUTELLA

Pour dicter, il aurait fallu Bernard Pivot, qui vient de rendre sa blouse et ses craies après la dix-neuvième finale des Dicos d'or. "Je n'ai pas envie de devenir le vieux pépé qui fait sa dictée...", a-t-il justement déclaré. On aurait aussi pu demander à l'un de nos lexicographes patentés, Alain Rey, M. Petit Robert. Mais ce n'est pas son genre, trop laxiste, trop conscient que la langue française, avec ses mille ans de bricolage et de rafistolages, est l'une des plus tarabiscotées qui soient.

La dictée, c'est comme du sirop. Il faut en ingurgiter beaucoup pour que cela soit efficace. C'est un exercice pour adultes. Laissons respirer les élèves, laissons-les se passionner pour des choses de leur âge et laissons tranquillement leurs professeurs commettre leurs fautes d'orthographe en marge des copies. A chacun son quota.

Soyons réalistes. Il y a les surdoués qui ont l'œil photographique. Ils mémorisent chaque mot, chaque lettre, chaque accent. Il y a les structurés : la grammaire leur offre des voluptés, des jouissances inédites. Pour les autres, il faut patienter. La vie est longue et l'apprentissage des pièges de la langue française prend bien toute une vie. Que l'on songe aux membres de l'Académie française qui se réunissent tous les jeudis après-midi, à l'Institut, et qui s'étonnent encore de leurs manques...

Oui, cela peut prendre une vie, et c'est magnifique. On commence analphabète et l'on peut finir ses jours plongé dans les dictionnaires. Au fond, la génération Nutella pourrait nous en remontrer dans le domaine des sciences, des techniques, de l'image et sur tout ce qui touche à Internet. Ses curiosités et son stock d'informations sont différents, voilà tout. Alors, il y a une sorte de mauvaise grâce à lui faire grief de ne pas se tromper d'époque.

Raymond Queneau (1903-1976), poète et romancier qui connaissait sa Zazie par cœur, observait ironiquement : "L'orthographe est plus qu'une mauvaise habitude, c'est une vanité." Cela invite à la modestie. Bien sûr, c'est excessif. Bien sûr, on l'adore cette langue française si souvent bafouée et maltraitée. Mais avouons que ce sont surtout les fautes des autres qui nous gênent. Il en va de l'orthographe comme de la fumée de cigarette...

Pour finir, un petit jeu. Voici deux extraits de lettres. Quels sont les romanciers ignares qui se sont permis de truffer leur correspondance de telles fautes ?

Première devinette. Qui a écrit : "Je suis dévoré d'impatience de voir le meilleur de mes amis celui avec lequel je serait toujours amis nous nous aimerons, ami qui sera toujours dans mon cœur. Oui ami depuis la naisance jusqua la mort" ?

Seconde devinette. Qui a écrit : "Mon cher grand-père pardonne moi de mon péché car j'ai moin mangé qu'a l'ordinaire j'ai pleuré pendant un cardeur aprè cela j'était en senglot (...)"?

Vous y êtes ? Allez, un indice : il s'agit respectivement de G. F. et de M. P. Etonnant, non ? Bon, d'accord, ils n'avaient pas dix ans ! On peut au moins leur accorder le mérite d'avoir fait ensuite beaucoup de progrès.

 ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 08.02.05







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